Pendant que je jetai mes quatre vérités à Indiana, celle ci s'était complètement fermée. Les bras croisés, les poings et la mâchoire serrés, le regard foudroyant.


Je suppose qu'elle ne trouva rien à répondre. Elle devait se rendre compte que j'avais raison. Alors, ni une ni deux, et sans que je m'y sois préparé ni même attendu, elle leva sa main furieusement. Et s'apprêta à l'écraser sur mon visage. J'eus le réflexe soudain d'attraper son poignet dans sa trajectoire. Je le serrai inconsciemment si fort qu'il lui aurait été impossible de se retirer avant que je lâche prise.

Nous étions tout près l'un de l'autre. La fureur dans mon regard avait fait place à une incompréhension totale. Pourquoi autant de haine ? Elle semblait vouloir me blesser à tout prix et par n'importe quel moyen, qu'il eut été physique ou verbal. J'en restais sur le c.. . J'en revenais pas.

Je restai la fixer un moment, essayant de comprendre. Puis je l'interrogeai, tout bas. Inutile de parler plus fort vu la distance à laquelle nous étions l'un de l'autre.

- Mais c'est quoi ton problème, Indiana... ?

Elle essaya de se débattre pour que je lâche son poignet, mais je ne comptais pas la laisser gagner cette fois. Du moins, pas aussi facilement. Je préférais attendre qu'elle se calme un minimum. Je devais lui faire mal, peut être, certainement même. Mais tant pis, elle aussi m'avait fait mal. Et moi je ne faisais pas ça pour la blesser, je faisais ça pour son bien. Histoire qu'elle se recentre.

J'attendis une réponse à ma question. Mais, évidemment, elle ne répondit pas. Il fallait s'y attendre. Pourtant elle avait forcément un problème, pour réagir de cette manière. Pour avoir de telles sautes d'humeur, j'entends.

Ce que je fis. Rien qu'à son ton, on sentait qu'elle s'était légèrement calmée. Elle n'était plus aussi furibonde, elle semblait juste exténuée par tant de rage.

C'est vraiment étonnant. Depuis que nous étions sortis de ce bar, j'avais la très étrange impression de connaitre cette fille depuis tellement longtemps. Ce n'était qu'une impression, mais bon. Je ne me serais jamais permis de la tenir aussi près de moi si rapidement sinon. Oui, j'avais l'impression que je la connaissais depuis une très longue durée, mais que je ne savais presque rien d'elle. Juste son nom, et son prénom. Et quelques traits de son caractère. C'est un véritable mystère, cette Indiana. Je n'arrête pas de le répéter, elle est vraiment étonnante.

- Tu m'as pas répondu, me permis-je d'insister. C'est quoi ton problème ?

Cette fois ci j'employai un ton plus posé, et plus grave.

Elle se frotta le poignet. En effet, je lui avais fait mal. Mais pour la bonne cause... Ah, mais qu'est-ce que je raconte, quelle bonne cause de quoi ? Je suis pas Gandhi, faut pas déconner. Genre je lui ai évité de se prendre une baffe d'un mec bourré, et je l'ai fait se calmer, ou pas. Et maintenant je me prendre pour un ouf de Superman.


Woh, je commençai à divaguer. Toujours est-il qu'elle ne voulut pas répondre à ma question. Et que mon insistance l'agaça, en attestait sa réponse :

Bien. Dis sur ce ton, elle ne pouvait être plus claire. Et elle avait raison, pourquoi aurait-elle répondu si elle ne le voulait pas ? Je ne l'ai pas fait moi-même tout à l'heure, je ne pouvais pas la forcer, je n'aurais pas apprécié si j'avais été à sa place. Enfin je voyais bien que ça n'allait pas, n'importe qui aurait vu qu'elle allait tout sauf bien.

- Ok, d'accord, pas de souci, j'abandonne, c'est pas grave, on s'en fout alors. Alors on oublie, et on fait genre tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes alors, on se la joue Candide et alors on sera heureux ! Ok, d'accord, ça marche, pas de souci. Tu me dis rien et on s'en fout. Enfin j'aurais essayé de comprendre, de te comprendre je veux dire, parce que je te trouvais cool, mais alors si tu veux pas, eh bah tant pis, c'est comme tu veux. Et comme tu veux, tu peux te barrer aussi. C'est comme tu le sens, t'es libre que je sache.

Je disais tout ça sur un ton faussement léger. Mais j'aurais pas dû dire cette avant-dernière phrase. J'avais pas envie qu'elle parte, pas tout de suite, elle me faisait marrer. Enfin, pas vraiment sur le moment, mais dans l'ensemble elle était marrante.

Ma tirade n'eut pas vraiment l'effet escompté. En effet, elle leva les sourcils en se demandant sûrement mais-quel-charabia-de-ouf-il-me-sort-celui-là alors que je déblatérais une suite de redondances dans un joyeux, ou pas, bordel. A la fin, elle sourit même. En même temps, il y avait de quoi. Je me serais écouté, j'aurais certainement eu la même réaction. Enfin elle réagissait, c'était le principal.

Elle me répondit finalement qu'elle n'avait pas envie de partir. Elle ne finira jamais de m'étonner. Indiana Imprévisible Sherwood. Ça lui correspond totalement.

J'eus un léger, très léger soupir de soulagement, et un sourire de satisfaction. Elle allait donc rester un peu plus longtemps que prévu à mes côtés, c'était une bonne chose.

Un vent glacial vint occuper l'espace de la ruelle. Je frissonnai soudainement. Voyant Indiana qui semblait avoir froid, je m'approchai inconsciemment d'elle à nouveau. Puis, sans vraiment réfléchir à mon acte et à ses conséquences, je passai ma main dans son dos pour la réchauffer un minimum. J'aurais dû réfléchir, je sentais d'avance qu'elle allait mal le prendre, mais au moins j'avais une excuse : j'étais en partie bien fait, hahaha.

- Ça va au fait, ton poignet ?, lui demandai-je au cas où, histoire aussi que mon geste passe mieux.

Encore une fois, Indiana ne réagit pas comme je l'attendais. En fait, elle ne me cracha pas à la figure lorsqu'elle sentit ma main dans son dos, elle sursauta simplement. C'est dingue, on peut s'attendre à tout et son contraire, avec elle. C'est dingue... Enfin c'est fou, quoi. Ahah.

Aussi, elle répondit d'un ton neutre à ma question. Un simple "Ouais, ça va." Ça me convenait... Plus ou moins, finalement. De toute manière, je n'aurais pas pu m'attendre à une autre réponse que celle-ci, puisqu'elle avait l'air de tout cacher, j'avais bien fini par le comprendre.

- Tant mieux, alors..., répondis-je tout aussi simplement.

Lorsqu'elle se retourna face à moi, elle sembla regarder quelque chose, ou quelqu'un, plus loin. Puis elle étouffa un rire, qui disparut aussi rapidement qu'il était arrivé, et parut se cacher derrière... Derrière quoi d'ailleurs ? Ah oui, derrière moi huhu. Je me retournai à mon tour vers le groupe de cas sociaux qui s'approchait, et compris aussitôt pourquoi Indiana se faisait toute petite. Règle numéro 1 avec ce genre de dégénérés : ne jamais rire en les regardant. Même s'il y a souvent de quoi, haha.


Tiens, l'une des têtes, dans la pénombre du moins, me disait quelque chose. Je crois que c'est avec lui que j'avais fait mes emplettes pour la semaine, haha. Quant au "mademoiselle joli-minoi" qu'il sortit, je sentais qu'il n'allait d'emblée pas passer. Mais avec un peu de raison, Indiana allait peut-être se taire pour éviter des emmerdes ? J'eus l'espoir, même s'il était presque vain.


Eh bah non, elle ne se tut pas. J'avais beau m'y attendre quelque part, les bras m'en tombèrent quand même.


Autant un relou qui pue dans un bar, à cogner pour la défendre, je dis pas la facilité. Mais là, ces mecs étaient vraiment pas commodes, j'en avais eu l'expérience en tant que spectateur l'autre jour avec mon vendeur, justement. Ce ne sont pas des peluches qu'ils cachent dans leurs poches s'ils ont besoin de frapper. C'est plutôt à coup de barres de fer et de couteaux. Heureusement, au cas où, j'avais toujours mon canif sur moi. Mais là, ça ne suffirait pas.

Comme prévu, les deux mecs s'énervèrent, ils allaient devenir violents. Je pris place entre eux et Indiana, et tentai de calmer les tensions. En vain.


Ok, j'aurais voulu être gentil, mais il y avait des limites à respecter, tout de même. Ma rage remonta d'un coup telle une éruption de geyser. Je bousculai à mon tour le premier qui tomba à terre, et jetai mon poing dans la face du second pour le sonner. Puis je shootai dans la crâne du premier, attrapai la main d'Indiana, et me barrai en courant.

Une fois tranquilles, cachés dans une autre ruelle, plus étroite et plus sombre encore, je repris mon souffle avant de hurler.

- Mais t'es malade ou quoi ? Qu'est-ce qui t'a pris de réagir comme ça ? Tu réfléchis un peu ou quoi bordel ?

A nouveau, Indiana s'énerva. Pour changer, me direz-vous. Elle fronça les sourcils et croisa ses bras en m'écoutant parler.

A mon tour je l'écoutai, la mâchoire serrée, les yeux noirs. Le poing tellement serré que mes articulations métacarpo phalangiennes en devenaient blanches. Mais est-ce qu'elle se rendait compte un minimum de ce qu'elle racontait ? C'était n'importe quoi. Je répondis sur le même ton que la première fois, encore incapable de calmer mes nerfs après une telle histoire.

- Je te demandais pas de lui faire les yeux doux, mais juste que tu la fermes, ne serait-ce que deux secondes, le temps qu'on se casse ! Ok on se connait pas, ok faut pas juger les gens qu'on connait pas donc faut pas te juger, mais là, de ce que j'ai vu de toi, je peux me permettre de dire que t'es de mauvaise foi, que t'es sacrément lunatique, et surtout, que t'es putain de susceptible ! Comment t'aurais fait si j'avais pas été là ? Tu les aurais cognés ? Toi, toute seule face à deux connards armés jusqu'aux dents ? Dans une ruelle où personne serait venu t'aider ? Là t'aurais bien regretté de leur avoir répondu. Apprends à réfléchir avant d'agir, ça pourrait t'être utile la prochaine fois, t'auras pas toujours quelqu'un pour te couvrir, Indiana !

J'espérais la faire réagir en lui avouant ce que je pensais d'elle ; du moins, quelques traits. Elle allait forcément mal le prendre, mais qu'importe. Il fallait bien que quelqu'un le dise, et c'était le moment opportun.

Et voilà, elle était furieuse. Encore. Quand j'y pense, je ne l'avais pas encore vue totalement calme et joyeuse. En même temps, on ne se connaissait que depuis quelques heures, mais tout de même. En fait, elle avait juste un sale caractère. Un sacré mauvais caractère. Mais c'est ça aussi qui la rendait intéressante, bien que très, très agaçante.

Elle me répondit d'un ton sec, et dur, mais elle ne criait pas. Elle m'accusa de juger son comportement. En même temps, on pouvait tous être d'accord sur les points que j'avais cités. Certes, je la jugeais un peu rapidement, mais c'était de sa faute si ces traits de son caractère ressortaient en majorité. Et encore une fois, elle m'insulta. Cette fois c'était quoi ? Abruti. Bien. Elle termina son speech par un bien violent "va te faire foutre", pendant lequel elle s'était approchée très près, tout près de moi. Trop près. Je serrai la mâchoire, ne sachant que dire, que répondre à ce qu'elle venait de me cracher à la figure.

Je serrai la mâchoire, à tel point que mes dents grinçaient, et la fixai droit dans les yeux. J'aurais pu la repousser facilement, mais non. Au lieu de ça, sans trop comprendre pourquoi cette idée me vint soudain à l'esprit, et sans que je réfléchisse une seule infime fraction de seconde, je l'embrassai. Moi aussi je peux être imprévisible parfois, haha.

Elle ne devait pas s'y attendre. Moi non plus à vrai dire. Je n'aurais jamais pensé réagir de la sorte. Ok, je venais d'embrasser Indiana. C'était définitif, j'étais bien pompet. Non pas parce que je la trouvais repoussante - bien au contraire, mais parce que je ne me serais jamais, mais alors jamais permis ce geste en étant complètement sobre.

Toujours est-il que ce fut vraiment sympa. Le contact soudain lié à la surprise avait créé une sensation inédite, très spéciale mais aussi très agréable.

Après quelques instants, Indiana se retira, le regard noir de fureur. Puis elle me gifla, tout simplement. Tout simplement, dans le sens où il fallait s'y attendre, bien que je n'aie pas eu le réflexe d'arrêter sa main en pleine course jusqu'à ma joue. Je la méritais un peu, je l'avoue, haha. Mais encore une fois elle m'avait blessé, encore une fois elle était violente - et Dieu sait que cette gifle fut physiquement douloureuse. Et donc encore une fois, sa réaction me fit sortir de mes gonds.


- Quand je te dis que t'es de mauvaise foi, repris-je sur un ton sec et fortement agacé, je me trompe pas ! Ok, je me suis pas contrôlé et je m'en excuse ouais, ok, ok. Mais faut savoir à un moment donné, si ça t'a pas plu, pourquoi tu m'as pas repoussé directement ? Bah non, tu me laisses faire. Mais par contre tu me baffes juste après en faisant genre t'es offusquée ? A quoi tu joues bordel ? Je comprends pas.

Indiana leva les yeux au ciel, l'air agacée, tout en tripotant son bracelet. Forcément, elle n'acceptait pas ce que je lui disais. Pour changer. J'avoue que j'y allais fort, mais je savais que j'avais raison. Et elle ne me contredit pas là-dessus. Elle ne me répondit même pas, à vrai dire. Je me sentis gagnant de la bataille, plutôt fier. Évidemment, je ne le montrais pas, j'étais bien trop énervé pour balancer un sourire incongru.

Après un silence pesant et tendu, alors que je pensais qu'elle m'insulterait à nouveau, elle fit ce dont je ne m'attendais pas, mais alors pas du tout. Je n'y aurais pas pensé une seule seconde. En même temps j'étais trop fait pour penser correctement à ses réactions, mais quand même. Bref. Tout ça pour dire que soudainement, Indiana m'embrassa à son tour.

Alors quoi, je fais quoi maintenant moi ? J'attends quelques instants, puis je la repousse et je la gifle, pour faire un comique de répétition ? Tout ça était surréaliste, complètement dingue, et surtout vraiment inattendu. Mais ça me plaisait. Au lieu de la repousser - parce que j'aurais vraiment été con si je l'avais fait -, je la laissai faire, et déposai même mes mains au creux de sa mâchoire. J'avançai d'un pas mais me heurtai au mur derrière elle. C'est vrai que cette ruelle était très étroite, huhu.

Celui ci fut plus intense, allez comprendre pourquoi. Sûrement parce que je m'y attendais encore moins que le premier. Je m'écartai tout de même au bout de quelques instants et écarquillai les yeux et levai les bras en ouvrant les mains en guise d'étonnement total. Et il y avait de quoi.

- T'es vraiment incompréhensible, je te jure !

- Ah bah ça, je veux bien te croire !, lançai-je alors en riant.

Pourtant je n'avais pas vraiment la tête à rire. Au contraire, j'étais terriblement agacé par son comportement. Un coup elle était d'une violence sans égal, un autre elle pouvait être réellement douce, comme il y a quelques instants. Et moi je devais supporter ça comme si tout était normal.

En même temps, cette soirée était tout sauf normale. Qu'on se le dise, j'étais entré dans ce bar dans le but de me détendre après la semaine passée. Juste pendre un verre, ou deux, et retourner à l'internat tranquillement. Et là, finalement, je me retrouvais dans une ruelle sombre et étroite, à embrasser passionnément une inconnue rencontrée quelques heures auparavant, qui a tenté de me gifler deux fois, qui a réussi son coup une fois. Dans une ruelle étroite et sombre, donc, après avoir cogné un crétin relou dans le bar, puis deux cas sociaux dans une autre rue, pour les beaux yeux de l'inconnue. Non, qu'on se le dise, cette soirée était tout, absolument tout, sauf normale. Aussi imprévisible que ma nouvelle rencontre, Indiana. Bref.

Pour calmer mes nerfs, j'allumai une cigarette. Je me  demandai d'ailleurs comment j'avais fait pour tenir avant. J'inspirai une énorme bouffée de fumée, et regardai à nouveau Indiana.

- Tss..., fis-je simplement en lui crachant le nuage toxique à la tronche, et en lui donnant un léger coup de poing dans l'épaule.


(peu inspiré, pardon ._.)

Pardon ? Pourquoi cette question ? Comme ça, d'un coup ? C'était à cause de ma cigarette qu'elle demandait ça ?

Sur le coup, je sentis mon dos se glacer. Je déteste aborder ce sujet. J'étais censé avoir tout arrêté depuis le jour de mon inscription à l'université. Ça faisait partie du jeu. C'était pour me reprendre en main. J'avais tenu... Une semaine, sans toucher à rien, à absolument rien. En y repensant, je me demande vraiment comment j'ai fait pour tenir aussi longtemps. Sans clope ni dope. Ni même l'alcool. Plus rien d'un coup. Nothing. Nada. Néant. Rien. Certainement l'une des pires, voire la pire semaine de ma vie. Si bien que je l'avais passée à hurler, pleurer, et me péter les phallanges contre les murs. Ou sur des gens. J'avais vite perdu toute volonté face à cet enfer : dès la fin de la semaine, j'avais regoûté à tout. Sauf la cocaïne. Ça j'évite maintenant. Et pourtant, c'est la plus tenace, difficile d'y résister...

Bref. Tout ça pour dire que, oui, je me drogue. J'essaie de convaincre mon entourage que je fais attention, que je consomme de moins en moins ou plus du tout, me convaincre moi même également. Mais non, je suis toxico. Dire que j'ai laissé mon père dans sa déchéance parce que je supportais plus ses multiples addictions... J'étais pas mieux que lui. En fait, j'étais même pire.

J'avais honte d'être tombé aussi bas. C'est pour ça que je détestais en parler. Encore plus avec une inconnue.

- Pourquoi tu me demandes ça ?, répondis-je donc simplement mais très froidement, en fronçant les sourcils.

Par réflexe, je posai brusquement ma main sur la poche de ma veste, pour vérifier la présence de mon paquet de beu.


Inutile de paniquer. Certes, mais c'était bien plus facile à dire qu'à faire. Il n'y était plus. C'était le même genre de sensation que lorsque l'on vérifie si la boucle d'oreille est toujours bien accrochée au lobe, et qu'on se rend compte qu'elle n'y est finalement plus. Panique involontaire. Je repris une inspiration de tabac pour me calmer. Enfin, me calmer, c'était vite dit.

- C'est une blague, Indiana ? , dis-je sur un ton que je voulais calme mais qui s'avéra finalement être menaçant. C'est toi ? Je te jure je rigole pas avec ça putain.

Elle avait les rennes en main. Un sourire mesquin s'installa sur son visage, le genre de sourire qui te mets hors de toi, qui te donne envie de frapper la personne qui le tient jusqu'à ce qu'elle arrête. Sauf que c'était une fille, mes principes m'interdisaient de... Oh et puis merde. Au diable les principes. Si elle continuait à jouer avec mes nerfs, ça n'allait pas durer.


Nooon, tu crois ? Mais si c'est pour dire de telles conneries, ferme la simplement ouais, ferme ta gueule.

Voilà que je devenais intérieurement violent. Je bouillonnais de rage. Ceci mélangé à la panique, ça donnait un mauvais cocktail. Seulement de l'intérieur, pour le moment. J'arrivais à me contrôler. Mais ça n'allait pas durer. Vraiment pas. De l'extérieur, je me contentai de serrer la mâchoire et les poings. Les yeux injectés de sang, la veine apparaissant sur mon front.


Pourtant j'étais pas trop d'humeur à rire, pas du tout même. Allez savoir pourquoi j'ai eu cette image ridicule de moi-même. Sûrement parce que je me trouvais ridicule, à réagir de la sorte, pour un vulgaire sachet d'herbe. Enfin je le voyais tout, sauf vulgairement. A vrai dire, je le voyais même comme un trésor.

Ridicule, c'était le mot exact.

J'inspirai à nouveau dans ma cigarette quand... Merde. Quand je me rendis compte que j'arrivais à la fin. Manquait plus que ça pour m'énerver encore plus. Ou pire. Le geste d'Indiana m'acheva. En effet, elle décroisa les bras en laissant apparaitre le sachet dans sa main, puis les recroisa. Ce putain de sourire narquoi toujours planté sur son visage. Ça me mit littéralement hors de moi.

Sans réfléchir, je me ruai sur la fille et décroisai moi-même de force ses bras en l'attrapant par les poignets, la plaquant toute entière contre le mur, plus violemment que la première fois évidemment. Puis je collai ma tête à la sienne. Le souffle court à cause de l'angoisse et de la furie.

- Joue pas à ça avec moi, Indiana, lui chuchotai-je délicatement au creux de l'oreille une fois sûr qu'elle était emprisonnée de mon étreinte, tu sais vraiment pas de quoi je suis capable.

Vraiment pas.