Je pousse la porte du bâtiment des dortoirs, entre et monte les escaliers quatre à quatre. La journée a été épuisante, je veux seulement une petite douche bien chaude et me glisser dans mon lit. J'ai trop bossé aujourd'hui, et en plus d'entraîner l'équipe de jambes cassées de 4 à 6, je me suis accordée une autre heure d'entraînement, un footing, et un peu de musculation, histoire de pas finir toute molle de partout. Ouais sauf qu'en attendant, t'as beaucoup maigri San. J'évacue le gras. Ouais bien sûr. Donc, tout ça pour dire que c'était franchement crevant tout ça. J'ai déjà pris une douche rapide mais j'en veux une autre. Où je me presserai pas. Et pis j'ai envie de parler à Aileen.

Je sors mes clés de mon sac et ouvre la porte de la chambre. Kerr n'est pas encore là, sinon la porte ne serait pas fermée à double tour. Tant mieux, j'aurai le temps de prendre mon temps justement, parce qu'Aileen a sûrement besoin de prendre une douche aussi. Et je ne partage pas encore la douche hu. La salle de bains ouais, la douche non. Ouais enfin si la personne s'appelle Antony ou Flavio, hein. C'est différent là, tu le sais. Bah bien sûr.

Je balance mon sac sur mon lit et me débarrasse du plus gros de mes fringues, c'est-à-dire tout, sauf mes sous-vêtements. J'entre dans la salle de bains, finis de me déshabiller et zioup, sous l'eau brûlante. Je vous raconte pas le bien qu'ça fait après une journée pareille. Surtout après avoir entraîné une bande de poulpes au cheerleading. Y a quelques bons éléments, c'est indéniable, mais y a aussi de bons gros boulets qui ralentissent l'équipe, et c'est franchement lourd.

Je m'enroule dans une serviette le temps de me sécher, puis me change, enfilant simplement un débardeur et un vieux jogging dont je remonte les jambes à hauteur de mes genoux. Sexy n'est-ce pas. Mais je m'en fous, y a juste Aileen et moi. D'ailleurs elle doit être arrivée, il est sûrement un peu plus de 21h. Et j'ai cru entendre la porte s'ouvrir et se refermer tout à l'heure. On va voir ça.

Je remonte mes cheveux en chignon tout en sortant de la salle de bains. Je souris lorsque j'aperçois Kerr. Bonjour la vraie Santana, bye la populaire redoutable. Et dire qu'on m'avait séparée de ma meilleure amie. De cette connasse de S, qui a craché son venin encore une fois. Elle disait qu'Aileen racontait mille et une conneries dans mon dos. Et j'ai été vraiment conne, je l'ai crue. Ça nous a brouillées pendant quelques semaines, un bon mois même. Mais aujourd'hui ça va mieux et c'est franchement génial.

- Salut Leen, ça va ? je demande, finissant d'attacher mes cheveux.

Je l'ai pas vue, aujourd'hui. On a pas les mêmes cours, ou en tous cas, notre emploi du temps n'est pas fait pareil. Et elle n'était pas présente à l'entraînement pour je ne sais quelle raison, j'ai oublié. Mais à vrai dire, elle est très bonne à ce niveau là, donc si elle loupe une fois, c'est pas bien grave.

"Oh salut Lopez, j'me suis pris la tête avec ma mère mais ça va et toi ?"

Aileen me sourit et s'assoit en tailleur sur son lit. Comment ça se fait, qu'elle se soit fâchée avec sa mère ? Ah ça y est, je me souviens. Elle avait rendez-vous chez le dindon rôti qui nous sert de proviseur. Parce que ses notes étaient en baisse, je crois. Je sais plus, je lui redemanderai. Mais ça veut dire qu'il a dû contacter ses parents. Purée, c'est aller loin. Enfin moi aussi, le proviseur appelle quelques fois mon père. Sous les ordres de Sylvester. Parce que j'ai pas de problèmes au niveau des cours, je suis plutôt bonne élève. Mais je suis aussi insolente. Et c'est ça qui pose problème. Et la coach n'a pas assez de répartie. Alors elle me colle et elle appelle mon père. Comme y a un mois et demi, quand elle nous avait surpris, Dam et moi, dans les douches des vestiaires. Oh non, on avait rien fait du tout, mais c'est Sylvester. Jamais j'irai fricoté avec Howard. Il est certes très canon et sexy, mais c'est mon pote, et je ne touche pas à mes potes. C'est tout.

- Ça va, je me suis défoncée à l'entraînement. Enfin, plutôt à l'heure suivante et au footing/muscu que j'ai fait après. Les filles ont été médiocres. Surtout certaines en fait. C'était chiant.

Je soupire, m'allongeant sur le ventre, face à Aileen sur mon matelas, les jambes relevées. J'appuie mon menton sur ma paume, mon coude posé sur le lit.

- Dommage que tu n'aies pas été là. Comment ça se fait que tu te sois pris la tête avec ta mère ? C'est à cause du rendez-vous avec le proviseur ?

Mon téléphone vibre. Afuh, merde alors. Je tâte mon lit. Merde il est passé où ? Je me redresse, m'asseyant, et cherche dans mon sac. Ah le voilà le connard ! Je le sors et déverrouille rapidement l'écran. Alors ? Numéro bloqué, qu'est-ce que cette connerie ? "Et si on apprenait que ton père n'était pas avocat ? S."

Mon téléphone m'échappe des mains et tombe sur le matelas, rebondit, et atterrit par terre. Tant pis pour l'IPhone 5S hein. Putain de merde. Qu'est-ce que c'est que ça ? Comment c'est possible ? C'est impossible, justement. Personne ne peut être au courant de ça. Même pas S. J'en ai parlé à personne putain de merde. Bordel. Je me lève précipitamment, prenant à peine le temps de balancer mon téléphone sur mon lit après avoir rapidement répondu. J'ouvre la porte, regarde dans le couloir, puis la referme, tournant la clé pour la fermer à clé. Putain de merde bordel.

Euh, y a Aileen San, calme-toi, elle va te prendre pour une dingue. Oh euh. Je respire à fond, m'appuyant contre la porte, je me redresse.

- Oh euh...T'as pas entendu ? Y avait de drôles de bruits dans les couloirs. Heum.

Je lui adresse un sourire forcé. Faut que j'appelle maman et mon père. Vite. Mais je peux pas devant Aileen.

Putain de merde enculé. S. S sait pour mon père. Elle sait que ce métier d'avocat n'est qu'une couverture, et qu'il est en réalité le chef de la mafia mexicaine, et que... Hop hop hop. Si ça se trouve elle ne le sait pas, elle veut juste essayer de le deviner, grâce à mes réactions ou quoi. Putain je sais pas, ça m'énerve. J'ai horreur de ne pas savoir. Surtout quand ça concerne une chose aussi importante bordel.

Je soupire, passant mes mains sur mon visage, me laissant glisser contre la porte. Mon excuse n'était pas crédible. Elle va penser que je suis folle, certainement. Putain, Cassie. Heureusement, elle est partie. Au moins elle n'aura pas d'ennuis, ça me soulage. Si Cassie est en sécurité, tout va bien. Après je m'en fous, de moi, si l'autre tarée m'emmerde tant pis, tant qu'elle ne dit rien à personne, qu'elle ne le crie pas sur tous les toits... Mais elle en est capable, cette connasse.

« Non, je n'ai rien entendu. Tu es sûre que ça va Santana ? »

Aileen se redresse et me regarde, l'air pas rassuré. Bon, faut que je prenne un autre air, je suis en train de lui faire peur. En même temps, moi-même j'au peur. Et ça arrive tellement peu souvent. Et je sais même pas si je réussirai à lui mentir. Mais je peux rien lui dire non plus, ça pourrait la mettre en danger.

- Oh eumh. Je me méfie juste des gens qui pourraient nous espionner et... Juste un petit souci d'ordre, hum, personnel.

Je me mords les lèvres, rattrapant mon téléphone pour envoyer un rapide message à mon père pour lui décrire la situation.

Je lève les yeux vers Aileen et tente un sourire. Loupé, j'y arrive pas. Ça me tracasse trop. Mais comment c'est possible ? Comment S peut-elle savoir ça ? C'est pas normal. Elle s'infiltre vraiment partout cette connasse. Mais j'ai jamais rien dit putain. J'en parle à personne, absolument personne ! Où est-ce qu'elle a foutu son nez pour découvrir ça ? S sait vraiment tout de tout apparemment. Mais c'est louche quand même. C'est tout sauf possible en fait. Putain de merde. J'suis finie.

« Je... Écoute je suis sûre que tout ira bien, d'accord ? On laisse la porte fermée cette nuit si tu veux, tu veux appeler un pion ? Ou n'importe qui, d'ailleurs ? »

Aileen se lève et s'approche de la fenêtre, fermant les volets avant de revenir allumer la lumière. Mais même, on est pas en sécurité ici. Si S a pu découvrir un secret aussi profondément enfoui, elle est capable de tout. Tout et n'importe quoi. Je passe mes mains sur mon visage en soufflant, regardant de nouveau Aileen par la suite.

J'suis en train de lui communiquer ma peur là. Faut pas. En même temps j'suis rarement dans cet état là, pour autant dire jamais. J'suis pas sensible, j'ai peur de rien, j'suis redoutable, c'est les autres qui ont peur de la Lopez. Mais visiblement, aujourd'hui, je me suis trouvée une adversaire de taille. Qui a un sacré avantage. Je ne connais absolument rien d'elle, et apparemment, elle, connaît tout de moi. C'est pas équitable comme règles du jeu. Pourtant je ne peux les modifier et je ne peux déclarer forfait. Cette chienne m'a enfermée dans son horrible jeu, et visiblement la seule façon de s'en sortir c'est de mourir. Mais je suis pas lâche. Et j'suis pas une perdante non plus, ce serait mal me connaître.

- S est une connasse Aileen.