- Damon -

Sac sur le dos et pomme en bouche, je sors du self. Mon entrainement de gym ne commence qu'à l'heure prochaine, il me reste donc un peu de temps devant moi pour pouvoir profiter de l'air de mars qui s'est installé depuis peu sur l'établissement, et du beau soleil nous fait l'honneur de sa présence...

Ou pas. Au beau milieu de la cour, je me retrouve finalement sous une averse aussi rapide et violente que soudaine, et n'ai d'autre choix que de foncer dans le premier bâtiment en face de moi, à savoir celui d'une majorité de salles de cours et du secrétariat d'administration, entre autres. Fait chier, pour la pause clope, on repassera.

Enfin, il en faut plus pour faire perdre sa bonne humeur à M. Howard. J'arpente les couloirs en guise de passe-temps, en attendant de sécher un minimum mes fringues. Heureusement, à cette heure-ci, presque tous les élèves sont en classe, ce n'est donc pas un drame si je ne suis pas franchement au top de ma forme physique à cet instant précis.

A l'angle d'un couloir, je croise soudainement une tête tout à fait inconnue. Un jeune homme aux yeux clairs, qui ressemble plus à un camé qui n'a pas dormi depuis deux mois qu'à un étudiant tout fraîchement débarqué et motivé pour conquérir l'université.

- Eh, le nouveau, je lance sympathiquement à son égard, on t'a jamais dit qu'il fallait dormir la nuit ?

Je lui souris amicalement, histoire qu'il ne s'imagine pas un foutage de gueule, et m'approche un peu plus pour me présenter :

- Je m'appelle Damon. Damon Howard.

J'ai décidé d'être sympa avec tout le monde aujourd'hui. C'est rare, mais ça peut parfois avoir du bon.

Suite à ma remarque, le jeune homme se met instantanément à rougir, puis marmonne un extrait, presque imperceptible, de Stopping by Woods on a Snowy Evening, un poème de Robert Frost. Un très beau poème, certes, mais je ne vois pas franchement le rapport avec ce que je viens de lui dire. J'en conclus assez rapidement que ce type n'est pas des plus communs.

Et cette conclusion se confirme l'instant suivant. Je me présente au garçon, et ce dernier ne trouve rien d'autre à faire que de baisser le regard vers ses chaussures, et de s'excuser... S'excuser de quoi ? D'avoir l'air d'un zombie ? Ou d'avoir malencontreusement croisé, pour ne serait-ce qu'une fraction de secondes, mon regard ? Il est vraiment bizarre, ce type. Je sais que je peux impressionner un peu, mais de là à s'excuser d'être sur mon passage, faut pas déconner non plus. Je fronce le regard, interloqué, tandis que Zombie s'en va.

- De quoi tu t'excuses ? Reviens, je vais pas te bouffer hein !, je lance en sa direction.