Je venais d'arriver il y a une heure dans ce fichue bahut dont je ne connaissais rien. Je ne connaissais même pas les alentours. Et le pire dans tout ça, c'est que je ne connaissais personne ici. Tout du moins c'est ce que je pensais. Aussi, j'avais décidé de sortir dehors pour prendre une taff. J'aimais pas le stresse et la en ce moment, je me sentais pas bien. Il fallait que je me calme les nerfs. Avant de sortir, je vérifiai que j'avais bien mon portable, mes cigarettes et mon briquet sur moi. Et surtout, mon couteau qui ne me quittait jamais. Comme j'avais bien tout, je me décidais alors à sortir dehors.

Je marchais d'un pas énergique, malgré le fait que je sois perché sur des talons. Aujourd'hui je m'étais plutôt habillé simplement : un slim effet jean bleu foncé, des bottines noires à haut talon, un tee-shirt noir en col V avec un pull bleu marine par dessus lui aussi en col V, et un long manteau noir qui était lui aussi en col V si vous voyez ce que je veux dire. Sinon peu importe, ce n'est pas le plus important. J'avais laissé mes cheveux châtain libre et le vent avait le malin plaisir de jouer avec eux pendant que je traversais la cours, direction le parc. Je savais que je n'avais pas le droit de fumer dans la cours, j'avais lu leur foutu règlement. Mais comme si j'allais me gêner ! Je fume ou je veux d'abord ! Mais bon, pour un premier jour, faire mauvaise impression, c'est pas top top. Donc bon, j'avais décidé de me rendre au parc, au moins la ba personne ne viendra m'embêter.

Bon, je vous l'avoue tout de même, j'avais bu dans le train pour venir jusqu'ici. Ba oui, vu qu'on avait pas le droit de fumer, fallait bien que je trouve quelque chose ! Du coup j'avais déjà le cerveau un peu embrumé, ce qui n'était pas plus mal. Enfin l'alcool remonte à quelques heures maintenant en y repensant, donc bon. Et puis j'avais mangé entre temps. Enfin bref.

J'arrivai dans le parc donc. Il n'y avait personne. Temps mieux. Je sortis une cigarette, la mis à mes lèvres, l'allumai avec mon briquet et tira une taff. Ah ça fait du bien ! Oui je sais, je pourris mes poumons. Mais vous savez quoi ? Je m'en contre fiche ! Temps que ça me faisait du bien. Je me mis alors à marcher dans le parc, fumant tranquillement, essayant de me réchauffer un peut car il faisait pas chaud à cette saison la dans le Nord. Oui, il fait beaucoup plus froid ici qu'à New York, c'est certain ! En plus j'aime pas avoir froid ! Ni d'être seule d'ailleurs... Non pense à autre chose !

Je ressens aujourd'hui comme l'envie d'aller me promener au parc. En fait, j'ai surtout très envie d'une bonne douille. Je m'étais dit que je ralentirais là-dessus, mais vu mon état je me sens que ça risque d'être compliqué. Je suis assez tendu, Logan ne m'adresse que très rarement la parole, Indi semble morte, et les autres, n'en parlons même pas. J'ai juste besoin d'un peu de compagnie, et actuellement je me sens relativement seul. Donc tant pis pour les bonnes résolutions. Une défonce douce ne me fera pas de mal ; ça ne fera que me détendre un peu.

J'enfile alors un blouson, range mes affaires dans mon sac que je jette sur mon épaule, et descends des dortoirs pour me rendre au parc. Rien qu'à l'idée d'aller fumer, le sourire me revient. La bonne humeur ressurgit. En plus, malgré les températures encore basses, le soleil brille. Aujourd'hui est une bonne journée.

J'entre dans le parc à la recherche d'un coin discret, histoire de ne pas me faire repérer. Sinon, bonjour le panneau d'affichage. S'ils n'avaient pas eu l'ingénieuse idée de foutre des détecteurs de fumée dans les chambres, j'aurais pu rester au chaud et tranquille dans la mienne, sans me soucier du regard des autres ; mais il a fallu faire passer la "sécurité des élèves avant tout". Du coup, je dois constamment chercher des endroits reclus où personne ne passe. Et ce n'est pas chose évidente, forcément.

Je me promène encore quelques instants dans le parc, observant le peu d'élèves qui profitent du soleil de Mars. Et c'est alors que je croise une jeune brune qui vient d'allumer une clope, et dont le visage est bien loin de m'être inconnu. Je la fixe quelques instants, abasourdi par sa présence, un sourire béat se dessinant tout seul sur mon visage.

-... Sum ?

Je m'approche de la fille pour vérifier que je ne me trompe pas. Et je ne me trompe pas.

- Bon sang, Sum, qu'est-ce que tu fous là ?, je lui demande, sous le choc de la rencontre.

Ouai, il faisait froid, et j'aime pas le froid. Heureusement que ma cigarette me réchauffait de l'intérieur même si le plus efficace conte le froid, c'est l'alcool. Rien ne vaut un bon verre de vodka pour se réchauffer, c'est certain. Enfin bref. Positivons, il y a tout de même du soleil. J'entendis des bruits de pas plus loin devant moi légèrement sur ma gauche. Mais je n'y fis pas attention. J'avais les yeux rivés au sol et j'étais un peu perdu dans mes pensées a vrai dire. Pourquoi m'avoir envoyer ici ? J'étais bien a New York. Bon d'accord j'avoue, je faisais quelques conneries avec ma bande. Mais tout de même ! Il n'y avait pas de raison d'en faire tout un plat !

- Sum ?

Qui connaissait mon nom ? Et surtout mon surnom ? Je relevais la tête, donnant un petit coup sur le coter pour remette mes cheveux en place car sinon ils me barraient le visage. Je vis alors un jeune homme dont la silhouette m'étais familière. Je mis un peu de temps pour le reconnaître, ne voulant pas tout a fait y croire. Keith Coen ? Ici ? Non ça ne pouvait pas être lui ! Ça serait trop beau. Pourtant il avait l'air de me connaître. Je m'étais arrêtée et le jeune homme se rapprocha de moi, sûrement pour être sur que c'était moi.

- Bon sang, Sum, qu'est-ce que tu fous là ?

Keith !! Plus de doute c'était lui ! Quel soulagement de le voir ici ! Au moins je connaissais une personne et en plus a qui je pouvais en quelque sorte me livrer. Je m'en souviens, quant on s'est connu, on a sur très vite plus trop de secret entre nous. Donc de le voir ici... C'était juste formidable. Un large sourire se dessina sur mon visage et mes yeux pétillèrent.

- Keith ! Ça fait super plaisir de te voir !

Je lui fis alors la bise comme si on c'était vu hier pour le saluer. Il y avait pleins de manières de saluer quelqu'un mais c'est toujours cette manière que j'adoptais pour dire bonjours a ceux que je connaissais et que j'aimais bien, mes amis quoi. Et Keith sans nul doute était mon ami, voir même un de mes meilleurs amis. Comme je vous l'ai dis, on avait très peu de secret entre nous. Je me reculais d'un pas pour pouvoir le voir dans son ensemble avant de répondre a sa question :

- C'est ma famille d'accueil qui m'a envoyer ici, soit disant parce que je faisais trop bêtises - dis en faisant des guillemets avec mes doigts pour ce dernier mot - et toi qu'est ce que tu fais la ? Ça faisait super longtemps que je ne t'avais pas vu. Je pensais que tu avais disparu je ne sais ou a vagabonder. Je ne t'imaginais nullement ici en tout cas.

Summer relève la tête, et me lance un sourire des plus radieux. Wow, ce sourire. Il m'a manqué !


Summer, ce n'est pas n'importe qui. C'est Sum, quoi. On s'est rencontrés un été quand je passais les grandes vacances chez ma famille à Manhattan. Je ne sais même plus comment s'est faite la rencontre, d'ailleurs. Toujours est-il que, dès la première heure passée avec elle en cet après midi de Juillet, j'ai su que nous allions forger une belle amitié. Et effectivement, ça n'a pas manqué. On ne s'est plus quittés, après ça. On s'est presque tout racontés, on sait presque tout l'un de l'autre. On a partagé beaucoup de choses ensemble. Même à mon retour sur Paris, on continuait à discuter par sms. Néanmoins, quand je suis parti au Canada et que les choses ont mal tourné pour moi, j'ai préféré la tenir à l'écart de tout ceci, et on s'est malheureusement perdus de vue pendant quelques temps. Et son absence m'a fait l'effet d'un grand vide. Alors la revoir ici, c'est complètement dingue. Je n'y crois toujours pas.

Elle non plus n'y croit pas trop, apparemment. Elle me fait une simple bise pour me saluer, comme si on ne s'était quittés que la veille. Je prends d'ailleurs le même réflexe. C'est comme si on ne s'était jamais lâchés.


Elle orne le mot "bêtises" de guillemets à l'aide de ses doigts. Je ris à sa réponse. Summer n'a jamais franchement été un enfant de chœur ; du moins pas depuis que je la connais. Alors finalement, le fait que sa famille d'accueil l'ait amenée ici ne m'étonne que très peu. Ce qui m'étonne surtout, c'est qu'ont l'ait envoyée exactement dans la même université que moi. C'est juste génial. Il me faudra sûrement encore quelques jours pour m'en remettre. Sum à Enamor. Il ne pourrait rien m'arriver de mieux je crois.

Elle me retourne alors la question, affirmant que ça fait longtemps que l'on ne s'est pas vus, et qu'elle pensait que j'avais disparu, n'importe où sauf ici. J'avoue ne pas avoir été très présent durant les derniers mois, mais c'était pour ne pas l'inquiéter de ma situation. Savoir qu'un de ses meilleurs amis est paumé dans les rues canadiennes, sans argent, et dépensant le peu qu'il a dans de la drogue, ce n'est pas le genre de nouvelles des plus agréables. Je ne voulais pas l'inquiéter ; et à vrai dire, je préfère ne pas lui en parler pour l'instant. C'est encore trop tôt pour en parler à qui que ce soit.

- Ouais, c'est vrai qu'on s'est perdus de vue pendant un moment, tu m'excuseras pour mon absence de plusieurs mois, d'ailleurs..., je réponds, un peu confus. C'est une assez longue histoire, je suis à l'UE depuis quelques temps maintenant, c'est assez sympa comme école. Je pense que tu vas t'y plaire !

L'entendre rire me fit beaucoup de bien et je ris aussi avec lui. C'est vrai que je n'étais pas toujours sage, on le savait tout les deux. Lui non plus n'était pas un enfant de choeur. On était dans le même panier tout les deux. Après tout, je partageais plus de points commun avec lui qu'avec n'importe qui d'autre. On avait le même type de vie, celle d'une personne indépendante qui rêvait de grandeur mais qui ne pouvait pas y accéder. Et aussi ce coté d'instinct de survie dans cette jungle dangereuse qu'est la grande ville.

- Ouais, c'est vrai qu'on s'est perdus de vue pendant un moment, tu m'excuseras pour mon absence de plusieurs mois, d'ailleurs... C'est une assez longue histoire, je suis à l'UE depuis quelques temps maintenant, c'est assez sympa comme école. Je pense que tu vas t'y plaire !

Plusieurs moi d'absence ? Pour moi ça été une éternité oui ! J'avais l'impression qu'il m'avait totalement oublié, que je n'existais plus pour lui. Il avait coupé les ponts du jour au lendemain, sans prévenir. Ca été une déchirure pour mi à vrai dire. De perdre un de mes meilleurs amis, ça été difficile. Et j'étais loin d'imaginé ce qu'il avait fait pendant tout ce temps la. Enfin, repenser à cela m'avais mis les nerfs à vif. Je refumais un coup pour refaire baisser la tension avant de regarder Keith et de lui répondre avec humour :

- Oh t'inquiète ! Tu n'as pas a t'excuser ! Tu as ta vie et moi la mienne. Et puis je suis bien plus forte que tu ne le pense alors franchement ce n'est rien.

C'est une assez longue histoire ? Et bien, Keith, tu aurais tout le loisir de me la raconter maintenant que j'étais coincée ici. Oui, je pense que je devrais rester dans ce trou pendant un bon bout de temps, même si j'ai 18 ans, que j'ai mon permis et que je pourrais me barrer loin.. très loin d'ici. Mais bon, vu qu'il était la, le temps serait sans doute moins long que je ne le pensais. Quant au fait que je vais me plaire ici ? Je n'en étais pas aussi sur que lui. Je tenais beaucoup à ma dépendance et m'enfermer ici ne me plaisait pas du tout. Enfin, je ferais le mur à l'occasion !

- Et bien maintenant que je suis coincée ici, tu aurais tout le temps de me raconter ce que tu foutais pendant tout ce temps. Si tu le dis... Tu dois connaitre les lieux alors ! Et les autres élèves. Tu dois surement connaitre les endroits pour pouvoir fumer en toute tranquillité, et les personnes à fréquenter ou a éviter alors !

Lorsque je m'excuse pour ma longue absence, Sum ravale une bouffée de cigarette, légèrement agacée. Visiblement, elle n'apprécie pas le fait que j'aie disparu ainsi pendant aussi longtemps. Je m'en veux d'ailleurs de l'avoir laissée tomber. Je crois qu'elle n'imagine même pas à quel point elle m'a manqué, et combien de fois j'ai dû résister à l'affreuse envie de renouer un lien avec en lui renvoyant un message, tout ça parce que je ne voulais pas l'impliquer dans mes histoires de merde.

Pourtant, son air sarcastique et légèrement tendu me permet d'affirmer le contraire. Je ne doute pas une seconde qu'il s'agisse d'une fille forte, bien au contraire. Mais je sais qu'elle a mal vécu notre éloignement. En tous cas, pour ma part, c'était difficile, malgré ma force mentale et morale.

Elle me demande alors la raison de mon absence, puisque "maintenant qu'elle est coincée ici, j'aurais tout le temps de lui raconter". Sauf qu'elle ne se rend pas compte de ce que j'ai vécu. En même temps, elle n'en sait rien, vu que je ne lui ai jamais donné un seul indice.

- C'est un peu compliqué. C'est encore trop frais, il me faudra du temps pour en parler, je pense. Enfin, le plus important, c'est qu'on se retrouve là, et qu'on reprenne contact, tu crois pas ?, je réponds, contrarié. Et sinon, ouais je connais les lieux comme ma poche, et quelques élèves par ci par là. Et par rapport aux coins fumette, justement j'étais en train d'en chercher un tranquille, ça te dit qu'on se fasse un joint ?, je demande en évitant ainsi le sujet qui fâche.

- C'est un peu compliqué. C'est encore trop frais, il me faudra du temps pour en parler, je pense. Enfin, le plus important, c'est qu'on se retrouve là, et qu'on reprenne contact, tu crois pas ?

Je le sentis contrarié. Apparemment, son absence de quelques mois a été douloureuse pour lui et je comprenais parfaitement qu'il ne voulait pas en parlait. Ce qui m'étais arrivée étant petite, c'est à dire la mort de tous mes proches et tout ça, j'avais beaucoup de mal à en parler. Voir même, je n'en parlais à personne. Seul des amis très proches comme Keith connaissait mon histoire. Mise à part ce que mon père m'avait fait lorsque j'avais 8 ans. Cet événement était de loin le plus horrible de tous et bien sur le plus douloureux à raconter. Car des gens qui meurt, on en voit tous les jours. Mais ça ! Non c'était bien trop horrible. Je ne voulais même plus y penser.

Je refumais alors un coup, pour essayer d'enlever ces images horribles de ma tête. Bien sur, ça n'y fit rien. Mais je terminai tout de même ma cigarette que j’éteignis en l'écrasant pas terre avec mon pied. Non pas ces images, pitié ! Aller, pense à autre chose petite Sum !

- Et sinon, ouais je connais les lieux comme ma poche, et quelques élèves par ci par là. Et par rapport aux coins fumette, justement j'étais en train d'en chercher un tranquille, ça te dit qu'on se fasse un joint ?

Un joint ? C'est justement ce qu'il me fallait ! Merci Keith ! Tu es mon sauveur ! Je n'osais pas le sortir mais maintenant que tu me le propose, je sens que je vais tirer dessus. Non la vraiment, je crois bien que j'en avais vraiment besoin. Je fis un magnifique sourire à Keith et lui répondis :

- Ouai ! Hyper bonne idée !

Je me souvenais pas que Keith touchait à la drogue. Peut être que si. Je savais qu'il fumait, mais qu'il se droguait, non. Enfin, peut être que j'étais trop défoncer pour m'en rendre compte, voila tout ! Je sortis alors mon paquet de clopes dans lequel il y avait aussi déjà deux joints soigneusement préparer tout prêt à l'emplois. Je suppose que si il me le demande, c'est qu'il doit en avoir. Je sortis alors un joint et rangeait le paquet. Puis je pris mon briquet et l'alluma. Ah... Qu'est-ce que a soulage. Toutes ces images affreuses s'évaporèrent peu à peu sous l'effet de la drogue. Je me mis alors à rire toute seule avant de faire part à Keith de ce qui me faisait rire :

- Je sais pas si je te l'ai raconté, mais la première fois que j'en ai pris, c'était chez moi, enfin chez ma famille d'accueil, tard le soir alors que j'étais censé dormir. Et j'y étais pas encore habitué alors ça m'a mis dans un tel état que je chantais et dansais dans toute la maison. Mes parents adoptifs sont donc descendu voir ce qu'il se passait et m'ont retrouvé au milieu du salon entrain de chanter je ne sais trop quoi. Ils ont voulu alors me réprimander et me demander d'aller me coucher, mais j'étais tellement dans les nuages que je ne les entendais pas. Ils ont donc cru que j'étais somnambule. Quand je l'ai appris le lendemain, ça m'a bien fait rire, et ils ont même pas compris pourquoi d'ailleurs ! Depuis, ils croient que je suis somnambule.

Summer parait tendue suite à ma réponse. Elle tire quelques lattes plus nerveuses sur sa cigarette, qu'elle écrase ensuite brièvement. Mais ce visage fermé rayonne subitement à ma proposition de joint. En effet, Sum dévoile un large sourire, et accepte très volontiers. Elle sort alors un joint tout préparé. Je devrais en faire de même, parfois. Ça pourrait être pratique dans certaines occasions. Lesquelles, je l'ignore, mais ça pourrait sûrement être utile, un jour ou l'autre. Le problème, c'est que dès que j'essaie d'en préparer à l'avance, je ne résiste pas à l'envie de l'allumer aussitôt. Dans la catégorie irrésistible, la beu rafle tous les prix avec moi.

Tandis que je démarre donc la préparation de mon joint, Sum allume le sien, et commence à inspirer la fumée toxique. Elle se met alors à rire soudainement, sans réelle raison apparente. Je la regarde, le sourire aux lèvres. Son rire m'a tellement manqué que, maintenant que j'ai la chance de pouvoir le revoir et le réentendre, je souhaiterais ne plus jamais avoir à le lâcher des yeux et des oreilles. Elle ne porte jamais aussi bien son prénom que lorsqu'elle rit : un vrai rayon de soleil estival.

Elle me raconte alors la raison de ce soudain éclat de rire. Je l'écoute attentivement, terminant de rouler la feuille. Puis je sors mon briquet et allume le tout, inspirant profondément. Je m'imprègne alors d'une vague de légèreté. La douille m'aurait fait un effet plus puissant et soudain, mais il faut avouer que les joints sont également très agréables. Surtout que celui-ci est particulièrement bien chargé ; le top.

"Je sais pas si je te l'ai raconté, mais la première fois que j'en ai pris, c'était chez moi, enfin chez ma famille d'accueil, tard le soir alors que j'étais censée dormir. Et j'y étais pas encore habituée alors ça m'a mis dans un tel état que je chantais et dansais dans toute la maison. Mes parents adoptifs sont donc descendus voir ce qu'il se passait et m'ont retrouvé au milieu du salon entrain de chanter je ne sais trop quoi. Ils ont voulu alors me réprimander et me demander d'aller me coucher, mais j'étais tellement dans les nuages que je ne les entendais pas. Ils ont donc cru que j'étais somnambule. Quand je l'ai appris le lendemain, ça m'a bien fait rire, et ils ont même pas compris pourquoi d'ailleurs ! Depuis, ils croient que je suis somnambule.", raconte-t-elle.

Je ris à mon tour. Sum est la plus grande fumeuse que je connaisse, je crois. Elle a toujours de drôles d'histoires à raconter. Elle en a fait voir de toutes les couleurs, à ses parents adoptifs. Cette histoire là n'est finalement pas très étonnante, venant d'elle !

- Ahah, les pauvres !, je réponds, enjoué. T'avais quel âge, la première fois ?


[Pas top, pardon pardon]

L'entendre rire me fit tout aussi du bien. Il m'avait vraiment manqué celui la ! On avait une année à rattraper, ce qui n'était pas une mince affaire. Je me demandais même comment il faisait ceux qui avaient plusieurs années à rattraper avec un proche, genre un gas qui vient de sortir de prison ou qui rentre d'un très long voyage. Comment ils font ? Parce que moi, ça serait méga dur de tout raconter à la personne que je n'ai pas vu pendant des années et à essayer de faire des choses qu'on n'avait plus fait depuis qu'on c'était quitté. Bon la, ça va, ça ne faisait qu'un an. Mais tu vois, même en un an j'avais déjà oublié qu'il prenait de la drogue tout comme moi. En tout cas, lui, il ne l'avait pas oublié.

- Ahah, les pauvres !, répond-t-il d'un ton enjoué. T'avais quel âge, la première fois ?

Je réfléchis pendant trente seconde en reprenant une taff au passage, chose qui n'allait pas m'aider à me souvenir mais bon, au moins ça détend. Surtout qu'elle était bonne ! Je l'avais acheté à mon dealer préféré avant de partir. Il en avait toujours de l'extra pour moi. Après tous les services que je lui avait rendu, il me devait bien ça après tout ! Et oui, j'en avais fait des choses, mais je préfère pas rentrer dans les détails.

Bon depuis quel age je consommais cette drogue ? Réfléchissons. De mémoire je devais avoir 16 ans la première fois qu'un ami m'avait conseillé de la drogue pour me soigner de mes cauchemars. Car oui, toutes les nuits je faisais des cauchemars dut à mon passé. Je revoyais en boucle la mort de ma tante, la maltraitance de mon père, et des choses parfois encore plus horrible. Donc je me droguais, soit au somnifère soit carrément avec de la beu. Je savais qu'il existait encore des drogues beaucoup plus dur, mais pour l'instant, celles que je prenais me suffisais. Avais-je déjà parlé à Keith de mes cauchemars ? Je ne sais plus. Mais je préfère ne pas y penser.

- De mémoire c'était vers mes 16 ans. Mais j'en suis plus totalement sur. C'était un pote qui m'en avait donné un peu pour que j'essaye car il me trouvait pas dans mon assiette et toute fatiguée. Enfin bref. Mais sinon à part ça, tu pense faire quoi ce soir ?

Car moi, pour ma part, j'avais bien envie d'aller sortir ce soir, d'aller faire un petit tour en ville ou quelque chose du genre, avec ou sans lui. Oui, c'était décidé. Mais il allait falloir encore que je passe du temps devant mon miroir pour masquer mes cernes car mon maquillage ne tiendra surement jusqu'à ce soir. Car oui, malgré le fait que je prenne des somnifères, j'arrivais toujours à me réveiller vers 3 heures du matin. Certes, c'était mieux que de se réveiller toutes les heures, mais j'avais tout de même un sommeil agité et je ne dormais jamais très bien. Du coup, j'avais souvent des cernes et l'air fatigué malgré tout ce que je pouvais faire à mon visage. Ça me déprimais parfois car on me prenait pour une toxico, chose que je ne suis pas réellement.

"De mémoire c'était vers mes 16 ans. Mais j'en suis plus totalement sur. C'était un pote qui m'en avait donné un peu pour que j'essaye car il me trouvait pas dans mon assiette et toute fatiguée," répond-elle à ma question.

Pas malin, le pote. S'il savait où il a amené la pauvre Sum, il s'en boufferait les doigts. Depuis qu'elle fume, il est moins rare de la voir dans un état second que dans un état de conscience parfaite, et c'est dommage. Pour son entourage, comme pour elle, pour sa santé. L'idéal serait de ne jamais commencer tout ça.

Enfin, je dis ça, moi, mais je peux parler. J'ai commencé les joins vers mes quinze ans, avec quelques potes. Mais la consommation était très irrégulière, à peine une ou deux fois par mois, histoire de jouer les durs. Petit à petit, on rapprochait les prises, mais ça n'a jamais été une question d'addiction. C'est quand j'ai débarqué au Canada que la consommation est devenue plus régulière. Un par jour, puis deux, puis trois, quatre, dix,... J'en fumais plus que je ne mangeais. Mais s'il n'y avait eu que ça, ça pouvait encore passer. C'était sans compter sur la présence de Steph, mon meilleur ami et énorme dealer de la zone. Il avait absolument de tout, et m'a fait gouter à tout ce qu'il avait. C'était du grand n'importe quoi ; je ne connaissais même plus la sensation de sobriété. A chaque fois qu'un effet s'estompait, je ravalais un cachet, je reprenais une douille, je me repiquais avec je ne sais quelle première connerie qui me passait sous la main. En y repensant, je me demande comment j'ai fait pour survivre. En me pesant lors d'une visite médicale, le "58kg" qui s'est affiché m'a fait réagir. Depuis, j'ai énormément ralenti sur toutes ces drogues. J'en rachète de temps en temps, mais les addictions ne font plus autant partie intégrante de mon quotidien. Sauf la clope et la weed. Mais ça, je sais que je n'arrêterai jamais vraiment, ahah.

D'ailleurs, pour évacuer tous ces souvenirs de ma mémoire, je reprends une latte sur mon joint. J'aurai bien d'autres moments pour y penser ; pour l'instant, mieux vaut s'intéresser à ma chère Sum qui se dresse devant mes yeux.

"Enfin bref. Mais sinon à part ça, tu pense faire quoi ce soir ?", demande-t-elle.

Je n'ai rien de prévu ce soir. A vrai dire, ça fait bien longtemps que je ne suis pas sorti en soirée. Et j'avoue que ça commence à me manquer un peu. Si on peut rattraper un peu le temps perdu, une bonne soirée à l'extérieur de l'université ne nous ferait pas de mal, bien au contraire.

- Ce soir ? Rien de particulier, et toi ?, je réponds.